Entretien réalisé par José Ramón Moratalla, rédacteur de la section Droit TIC du portail www.elderecho.com
Entretien
Alfonso Codes et Javier Ibáñez de l’Observatoire de Transformation Numérique CMS Comillas
Nous avons eu le plaisir d’interviewer Alfonso Codes, associé de CMS Albiñana & Suárez de Lezo, et Javier Ibáñez Jiménez, cofondateur d’Alastria Blockchain System, à l’occasion du lancement récent de l’Observatoire de Transformation Numérique CMS Comillas.
1.- Pour nos lecteurs qui ne connaissent pas encore l’Observatoire de Transformation Numérique CMS Comillas, pourriez-vous nous le présenter brièvement et indiquer quels sont ses objectifs et son public cible ?
L’Observatoire de Transformation Numérique CMS Comillas a pour ambition de devenir une référence, tant au niveau européen que mondial, dans l’étude légale des processus de numérisation dans les domaines social, économique et juridique. La pratique du droit, combinée à la transformation numérique de la société, nécessite une innovation constante dans l’enseignement et la recherche.
2.- Qu’est-ce qui a incité CMS à créer cet Observatoire et quel rôle pensez-vous que Comillas peut jouer en tant qu’entité partenaire du projet ?
La pratique du droit et la transformation numérique de la société nécessitent une innovation continue dans l’enseignement et la recherche. La création de cet Observatoire en collaboration avec l’Université ICADE Comillas représente un atout académique dans le domaine juridique. Son expérience en recherche et son engagement envers l’innovation éducative sont essentiels pour relever les défis du droit numérique. De plus, sa contribution garantit une approche rigoureuse dans l’analyse des processus de transformation numérique, alliant théorie et pratique pour générer un impact tangible dans les domaines académique, économique et social. Cette représentation est due au rôle de premier plan joué par Javier Ibáñez, professeur à Comillas ICADE et cofondateur du Consortium Red Alastria, membre du executive board de la BlockStand SME Digital Alliance (EU COM), le plaçant comme un expert reconnu en droit numérique et technologies DLT en Europe, récompensé par la médaille d’honneur de la European Lawyer’s Union pour son parcours de recherche et d’innovation.
3.- En ce qui concerne Comillas, qu’est-ce qui a motivé la création de cet observatoire, et que peut apporter CMS en tant que partenaire ?
Comillas a toujours soutenu l’innovation, notamment à travers son Centre d’Innovation du Droit, piloté par la faculté de droit (ICADE). Plus particulièrement, l’évolution récente du EU Digital Finance Pack, la réglementation européenne sur les services et marchés numériques, ainsi que l’augmentation de la demande pour des services décentralisés applicables à l’IA, l’IoT et plus récemment le métavers, sont autant de facteurs suscitant l’intérêt des chercheurs, de l’industrie et des législateurs. En ce sens, CMS Albiñana & Suárez de Lezo offre une expérience de marché dans des domaines juridiques interconnectés, qui améliorera significativement et de manière synergiques les efforts de recherche et de transfert technologique, tout en permettant à la firme juridique d’offrir des services optimaux dans un contexte de numérisation de la société.
4.- Pensez-vous que la transformation numérique est bien gérée dans les entreprises ? Croyez-vous que les entreprises s’engagent sincèrement, ou, au contraire, que cette transformation est plus le résultat de circonstances extérieures et contrainte ?
Il s’agit moins d’une gestion correcte ou incorrecte que d’une gestion informée et efficace ou inefficace. Certaines entreprises investissent massivement dans la technologie sans évaluer l’impact ou identifier les risques liés à leur investissement ; d’autres se sentent submergées par la quantité d’informations sur la transformation numérique, tandis que certaines sont trop prudentes. Il y a de tout, mais je ne dirais pas que la clé réside dans la sincérité de l’engagement, mais plutôt dans un besoin qui n’est pas toujours bien déterminé, étant donné que l’impact de la technologie demeure souvent non mesuré, notamment pour des solutions comme les registres distribués.
5.- Et quant aux pouvoirs publics tels que l’administration et le législateur, facilitent-ils vraiment la tâche aux entreprises, ou y a-t-il encore des marges d’amélioration dans le modèle actuel de transformation numérique ?
Les sandboxes pour mettre en œuvre des réglementations comme le Pilot Regime (infrastructures post-négociation des marchés) se révèlent être des collaborations fructueuses, bien que le modèle de coopération public-privé puisse encore être substantiellement amélioré, ce qui est naturel étant donné la jeunesse de ces modèles collaboratifs. En ce sens, le rythme des administrations en revanche des politiques légales, souvent d’origine communautaire, comme dans le domaine de l’identité numérique ou des registres électroniques pour des services qualifiés de confiance et de certification est quelque peu disparate.
6.- Selon vous, quelles mesures devraient être mises en place à la fois par le législateur national et européen pour favoriser la transformation numérique des entreprises, en recherchant leur viabilité, durabilité et pérennité ?
Cette question appelle presque à un traité complet, mais en résumé je pense que le législateur doit simplement canaliser correctement les initiatives privées, comme dans le modèle de sandbox, en imposant des restrictions minimales, dans un environnement de concurrence loyale, de protection des utilisateurs numériques et de tutela de la propriété intellectuelle et des investissements.
7.- Les technologies actuellement qualifiées de disruptives telles que l’IA, le blockchain, et bientôt la computation quantique… font-elles de la transformation numérique un processus sans fin, comparable à une quête insatiable, comme dans le mythe grec d’Erichthon ?
La situation évoque plutôt le retour de Sisyphe à flanc de montagne, pour plonger éternellement dans un cycle de création, d’hyperactivité, de découragement et d’acclimatation technologique. C’est ce qui est observé avec le blockchain et d’autres modalités de DLT par exemple. Il est certain que les technologies de l’information et de la communication continueront d’évoluer, et dans quelques années, on parlera d’autres types de technologies où la donnée ne sera plus l’élément central, en raison d’une plus grande granularité, comme c’est le cas avec l’analyse physique-quantique.
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Mon opinion
Il est fascinant de constater à quel point la transformation numérique peut être perçue comme un chemin sans fin pour les entreprises. On observe en effet une diversité de stratégies, certains optant pour une innovation rapide, tandis que d’autres se montrent plus réticents. À mon avis, le véritable défi réside moins dans la capacité d’adoption des nouvelles technologies que dans la compréhension de leur impact à long terme. Les acteurs publics ont un rôle crucial à jouer en facilitant cet apprentissage, afin que les entreprises puissent naviguer dans cet environnement complexe de manière éclairée et durable.
- Source image(s) : elderecho.com
- Source : https://elderecho.com/alfonso-codes-y-javier-ibanez-la-practica-del-derecho-y-la-transformacion-digital-de-la-sociedad-exigen-innovacion-permanente
Marine Martin, originaire de l’île Maurice, a débuté sa carrière comme conseillère bancaire avant de se faire un nom à New York. Passionnée par les marchés financiers internationaux, elle se spécialise dans les domaines de la banque, de la finance et du trading.