Le dernier rapport de l’ONU sur l’E-Government Survey
Le dernier rapport de l’ONU, intitulé E-Government Survey, évalue le développement et l’efficacité des services publics numériques à l’échelle mondiale. Il place l’Espagne au 17e rang parmi les 193 pays examinés et au 10e rang au niveau européen. Madrid se distingue aux côtés de Tallinn (Estonie) en tant que ville affichant un grand nombre de démarches officielles automatisées. Toutefois, cette position se fonde sur des données objectives concernant l’infrastructure, les ressources attribuées, les compétences du personnel et les services proposés, et non sur leur performance réelle ni sur la perception qu’en a la population. De plus, cela ne signifie pas que l’Espagne soit un modèle à suivre, mais plutôt qu’elle est en concurrence avec d’autres pays, où l’on constate une fracture numérique qui, bien qu’elle ait été réduite de moitié en deux ans, demeure significative.
Le gouvernement espagnol attribue cette position à "une stratégie nationale cohérente de collaboration entre les différents niveaux de gouvernement, le secteur privé et la société civile". Le rapport analyse également les infrastructures de télécommunications, les capacités des fonctionnaires et des citoyens en matière d’administration électronique, ainsi que la disponibilité des services en ligne.
Grâce à ces éléments, le rapport de l’ONU classe l’Espagne parmi les 20 premiers pays mondiaux pour l’allocation de ressources au développement du gouvernement électronique, ainsi que pour le catalogue des services en ligne disponibles, notamment les impôts, les enregistrements et les licences, l’interopérabilité des portails gouvernementaux et la participation des citoyens aux avancées technologiques.
Parmi les villes étudiées par les Nations Unies, Madrid se distingue, occupant le devant de la scène avec Tallinn en ce qui concerne la digitalisation. Le rapport souligne particulièrement les services de gestion urbaine, de mobilité, de santé et de participation citoyenne.
Malgré cette position encourageante, le gouvernement reconnaît qu’il "reste encore du chemin à parcourir pour améliorer continuellement les services numériques, former les fonctionnaires et éduquer la population sur les compétences digitales. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons garantir que l’Espagne maintienne non seulement sa position actuelle, mais que tous puissent bénéficier d’un gouvernement électronique plus efficace, transparent et proche des citoyens".
L’analyse récente de la fondation Alternatives concernant l’administration électronique rappelle que le programme Décennie numérique de l’UE fixe des objectifs à atteindre dans six ans : 100 % des services publics essentiels en ligne pour les citoyens et les entreprises, 100 % des citoyens de l’UE ayant accès à des dossiers médicaux électroniques et 80 % des citoyens disposant d’une identité numérique.
Un autre cadre de référence européen, le Benchmark eGovernment, souligne l’importance de centrer les services sur l’utilisateur, d’assurer la compatibilité avec les appareils mobiles, de garantir transparence et information claire sur les services, ainsi que sur l’utilisation des données personnelles, tout en intégrant des outils technologiques comme la signature électronique et en permettant aux étrangers d’accéder aux services.
Celia Fernández Aller, professeur à l’Université Polytechnique de Madrid et spécialiste en droit, éthique et nouvelles technologies, affirme que l’Espagne se situe généralement bien grâce à ses infrastructures de connexion et à des outils comme la signature électronique. Cependant, elle précise qu’il existe une nette distinction entre les chiffres et l’efficacité réelle des services accessibles.
"Si un service est disponible en ligne, il doit être opérationnel", insiste-t-elle. "Il ne suffit pas qu’une outils numérique soit proposé ; encore faut-il qu’il soit réellement efficace. Deux tâches peuvent sembler simples, comme le registre des résidents, mais d’autres sont bien moins fonctionnelles, surtout si on les compare aux processus dans les entreprises de pointe."
Elle souligne également l’importance de former la population pour qu’elle puisse accéder à ces services. "C’est un élément clé", déclare-t-elle, ajoutant : "En Espagne, notre niveau d’alphabétisation numérique n’est pas optimal. Cela ne se résume pas à fournir des ordinateurs ; il faut aussi former les gens. Et puis, nous avons le vieillissement de la population, qui représente une fracture importante. Il faut garantir un accès analogique aux aînés, mais souvent cela n’est pas réalisé."
Esteban Morillo, directeur responsable de l’automatisation intelligente chez Servinform, une entité chargée de la digitalisation des services en Andalousie et aux Baléares, a d’abord été surpris par les conclusions du rapport de l’ONU. Néanmoins, il estime que celles-ci sont justes en fonction des paramètres choisis pour l’évaluation.
"Il y a une grande quantité de procédures administratives à optimiser", souligne-t-il. "Certaines ont besoin d’améliorations, comme la gestion des subventions." Morillo pense qu’il est essentiel de créer une meilleure intégration entre les différentes applications administratives et d’augmenter la robotisation afin d’accélérer les tâches réalisées par les administrations.
Concernant la justice et les aides telles que l’aide à la dépendance, il remarque que beaucoup de services présentent des déficiences numériques. Les barrières telles que le fossé entre le langage administratif et les citoyens sont également mentionnées comme un obstacle.
Il affirme que la digitalisation dans le domaine administratif peut être sécurisée, mais qu’elle doit se faire sans lenteurs excessives. "Les demandes de sécurité, bien que légitimes, retardent parfois les procédures", souligne-t-il.
Un récent rapport sur l’administration numérique, élaboré par Amazon Web Services (AWS), NTT DATA, Genesys et Salesforce, met en lumière les opportunités existantes en Espagne. Selon ce rapport, "il y a de la volonté, de la technologie et des compétences disponibles" pour rendre les services plus agiles et accessibles. Le rapport insiste sur la nécessité de redéfinir les services publics en mettant l’accent sur les besoins des citoyens, en réduisant les démarches inutiles et en évitant la duplication d’informations.
Notre Point de vue
Nous constatons que malgré les avancées notables en matière de digitalisation des services publics en Espagne, un travail supplémentaire est nécessaire pour véritablement optimiser l’expérience des usagers. L’accent mis sur la formation et la sécurité face aux obstacles bureaucratiques semble essentiel. L’idée d’un gouvernement électronique véritablement accessible pourrait non seulement renforcer la confiance des citoyens dans leurs institutions, mais aussi favoriser une plus grande cohésion sociale. En naviguant vers une Europe plus intégrée et numérisée, il est crucial que les pays membres, à l’instar de l’Espagne, collaborent dans l’atteinte de ces objectifs communs tout en veillant à l’inclusion de tous les citoyens.
- Source image(s) : elpais.com
- Source : https://elpais.com/tecnologia/2025-02-03/la-onu-situa-a-espana-en-el-puesto-17-en-administracion-digital-aunque-la-percepcion-de-los-usuarios-es-diferente.html
